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De la plume au pinceau … Mise en mots de Kahlo

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Je viens encore vous agacer avec mes amours mexicaines. ;-)

Celle-ci remonte à plusieurs années.  Je la porte en moi depuis que j’ai dévoré sa biographie par Hayden Herrera.  Elle ressurgit parfois au détour d’une chanson de Chavela Vargas.  Une passion admirative et pleine d’ardeur pour une femme.

On connait presque tous les circonstances qui ont fait de la vie de Frida Kahlo une lutte continuelle et souffrante face à son corps meurtri et brisé. Néanmoins, je crois qu’il faut plonger plus loin que son oeuvre artistique et aller au-delà du mythe qu’on en a fait pour comprendre à quel point cette femme se livrait en toute sincérité.  J’ai longtemps cru qu’elle avait besoin de peindre pour extirper entièrement ses blessures, que la douleur qui transparaissait dans les tableaux et les autoportraits durs et lucides se devait de s’échoir là, au travers des intenses couleurs.  Le besoin allait bien au-delà.  Au travers des mots aussi.

J’avais pourtant lu plusieurs de ses lettres écrites de sa main dans la casa azul à Coyoacan.  Même pour ceux qui ne comprennent pas l’espagnol, il serait possible de comprendre la portée lucide et violente de sa plume. Vous savez, lorsque le papier parle, que l’encre suinte et que les pattes mouchetées et entremêlées sur elles-mêmes évoquent d’emblée ce qui y est à décoder?  Néanmoins, lorsqu’on a la chance de lire ses lettres et de les comprendre, on saisit vite que le pinceau et les couleurs étaient insuffisants pour cette femme.  On le saisit encore mieux lorsqu’une comedienne choisit de les faire revivre ces mots et de nous les faire entendre…

Excessivement troublante et touchante était Sophie Faucher hier soir au MBAM dans Correspondance, une mise en scène composée de lettres, de poèmes et d’extraits de journaux intime de la peintre.  Excessivement comme l’était Frida dont l’art était « un ruban autour d’une bombe » comme l’a souligné Breton.  Excessivement découvrir que l’expression des émotions dures à même les couleurs de ses toiles, Frida savait tout autant les manier à même les mots, tout autant qu’elle pouvait regarder la douleur en face et la nommer, ajoute une dimension importante au portrait qu’on se fait de l’artiste.

D’une mise en simple simple et épurée, où les cadres suspendus évoquent non seulement le portrait que Faucher dresse d’elle par son choix de textes, mais aussi une mise en abyme évidente, mais combien juste, Correspondance m’a tout simplement séduite.  J’y ai redécouvert la femme forte et fragile qu’on a tristement transformée en icône commerciale, la sensible et dure, mais aussi celle qui fait preuve d’autodérision.  La femme festive avec sa volonté farouche de vivre. Et la femme brisée de toutes parts qui aime avec passion et qui aime la passion aussi…

© Musée des Beaux-Arts de Montréal

© Musée des Beaux-Arts de Montréal

La lucidité de sa plume est implacable.  L’interprétation de Sophie Faucher, passionnée, tendre, admirative et respectueuse.  Frida n’y est pas présentée comme une victime de son accident ou de son mari volage, mais bien comme une femme courageuse, avec ses doutes, ses grandes déceptions, ses colères et ses peines et bien sûr son amour toujours si puissant et fidèle pour Rivera.  Un amour dévorant qui la détruit par moment et rythme sa vie longuement;  on découvre aussi l’immense abnégation dont elle a fait preuve. Ajoutez à la lecture théâtralisée la présence de quatre magnifiques mariachis qui ponctuent et colorent la scène de leurs airs nostalgiques et festifs… comment ne pas être conquis ?

Correspondance, un tableau vrai, sincère et intime que nous dépeint puissamment la lecture théâtralisée de Sophie Faucher et qui est absolument respectueux de l’artiste.


Classé dans:Actualités / Événements, Como la espuma, Mexico Quérido Tagged: Chavela Vargas, Correspondance, Frida, Frida Kahlo, MBAM, Rivera, Sophie Faucher

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